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Affaire Lambert : le rapporteur du conseil d'Etat pour un arrêt des soins

Rédigé par , le 20 June 2014 à 15h50

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Vincent Lambert rapporteur public Conseil d'Etat euthanasie tétraplégique

Ce pourrait être une première en France. Sur fond de débat sur l'euthanasie, avec l'affaire Bonnemaison et la déclaration de François Hollande sur une possible assistance médicalisée pour terminer une vie en toute dignité, le Conseil d'Etat devra trancher dans les jours qui viennent sur un arrêt ou non de l'alimentation et l'hydratation artificielles de Vincent Lambert. 

Ce jeune homme de 38 ans, devenu tétraplégique à la suite d'un accident de la route en 2008, est depuis 6 ans dans un état pauci-relationnel, c'est-à-dire que son état de conscience est minimal, voire végétatif. Les seuls signes détectables sont un sourire, des larmes, le sommeil ou l'éveil. Cependant le Docteur Kariger a précisé que ces réactions n'ont pas de valeur clinique objective.

Un état du patient dégradé et sans espoir d'amélioration

Le rapporteur public du Conseil d'Etat, Rémi Keller, a rendu ses conclusions ce vendredi 20 juin et a préconisé l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation artificielles de Vincent Lambert. Si l'avis du rapporteur est suivi, la mort du patient interviendra dans les 3 à 5 jours de l'arrêt des soins. Les conclusions ont été rendues après examen de l'expertise médicale de trois spécialistes en neurologie requise par le Conseil d'Etat en février lors de son audience. Le constat des médecins est sans appel et confirme la dégradation de l'état de conscience du jeune homme et de lésions cérébrales irréversibles. Ils font donc état d'une impossibilité d'évolution et d'amélioration de sa situation médicale. Cependant, les experts ont conseillé d'être prudent dans les conclusions en précisant que le degré d'atteinte de la conscience ne peut constituer le seul élément dans la détermination d'un éventuel arrêt de traitement.

Ces conclusions viennent apporter un espoir de clôture d'un drame familial qui n'en finit pas. Depuis près d'un an, les membres de l'entourage du blessé se livrent un véritable combat pour savoir quelle solution est la meilleure. Les parents, catholiques traditionalistes, refusent l'arrêt des soins et avaient saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne contre le processus de fin de vie de leur fils lancé à deux reprises par le Docteur Kariger et soutenu par l'épouse et le neveu du blessé. Drame familial qui est d'autant plus compliqué puisque le patient n'a donné aucune directive et n'a désigné aucun tiers de confiance pour faire connaître sa volonté dans de telles circonstances.

Le maintien d'un état dégradé et irréversible en tant qu'acharnement médical

Le tribunal s'était prononcé pour le maintien en vie de Vincent Lambert. Le rapporteur préconise donc l'annulation de ce jugement puisque la décision d'interrompre le traitement correspond aux conditions de la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie. Cette loi, sans légaliser l'euthanasie, indique que les traitements doivent être arrêtés en cas d'obstination déraisonnable, ce qui revient à un acharnement médical. Rémi Keller a estimé que le maintien d'un état dégradé et irréversible correspondait à un tel acharnement.

Il appartient désormais au Conseil d'Etat réuni en sa formation la plus haute, l'assemblée du contentieux composée de 17 juges, de statuer sur l'arrêt ou non de l'alimentation et de l'hydratation de Vincent Lambert. Une crainte a été exprimée d'une jurisprudence dangereuse pour les 1500 autres cas pauci-relationnels. Cependant, il n'est pas certain que l'arrêt, même dans la possibilité d'une décision en faveur d'une fin de vie, constitue un arrêt de principe applicable pour toute autre future affaire. Le rapporteur a bien précisé que chaque cas est unique et que la décision n'aura pas obligatoirement un caractère général.

Bien qu'il est visible que la question de l'euthanasie est de plus en plus discutée, aucun signe n'a encore été donné à ce jour par le gouvernement ou par le corps juridique d'une future adoption d'un texte de loi ou d'une jurisprudence. Il ne faut donc pas faire de conclusion à la hâte sur la future décision du Conseil d'Etat, quelle qu'elle soit. Dans le cas d'une décision favorable à l'arrêt des traitements, il restera aux parents un seul recours possible, ils pourront saisir la Cour Européenne des Droits de l'Homme dans le but de suspendre l'application du jugement. 

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L'auteur
Céline Le Goff

Céline Le Goff

Rédactrice

Bio

Céline, étudiante en droit, a rejoint le journal pour l'été 2014 en tant que rédactrice. Voir plus

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