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Ébola : La question sensible du rapatriement permet le développement d'un marché inattendu et dangereux

Rédigé par , le 17 October 2014 à 15h13

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La question du rapatriement des personnes contaminées reste sensible.

La question du rapatriement des personnes contaminées reste sensible.

Une infirmière norvégienne a été rapatriée, dans le plus grand silence médiatique, par une PME française il y a quelques jours. Les sociétés d'assurances s'occupant d'ordinaire des rapatriements médicaux refusent, pour la grande majorité, de s'occuper des malades atteints d'Ébola, ce qui permet à certaines entreprises de tirer leur épingle du jeu.

Des sociétés d'assurance qui refusent la prise en charge du virus

Pour comprendre pourquoi la question du rapatriement pose problème, il faut connaître le fonctionnement de son processus. En France, « le rapatriement aux frais de l'État n'est pas un droit », comme l'indique le site Internet du Ministère des Affaires Étrangères. Il faut donc souscrire, avant son départ pour un pays étranger, à une assurance maladie spécifique et à une assurance de rapatriement sanitaire.

Le souci, c'est que les sociétés derrière ces assurances sont plus qu'hésitantes à prendre en charge les évacuations concernant le virus Ébola. Ces sociétés, qui rapatrient la majorité du temps des accidents graves (traumatologies, accidents cardiovasculaires), refusent d'assurer l'évacuation de personnes contaminées par le virus. Selon elles, le risque infectieux et le manque de matériel de protection sont trop importants pour prendre en charge les personnes contaminées.

Cette situation a, de plus, la malheureuse conséquence de compliquer la lutte contre la maladie. En effet, de plus en plus de soignants et d'experts médicaux refusent de partir en Afrique de l'Ouest, sans la garantie de pouvoir être rapatriés si jamais ils sont contaminés par Ébola. Pour Brice de le Vingne, directeur des opération de Médecins Sans Frontières, la situation est problématique : « nous ne pourrons pas convaincre des volontaires d'aller dans ces pays pour aider la lutte contre l'épidémie si nous n'avons pas un bon système d'évacuation ».

Ébola change la donne 

Compte tenu du taux de létalité du virus, de nouvelles questions se posent quant à la prise en charge de ces malades. Pour Jean-Yves Nau, docteur en médecine et ancien journaliste au Monde en charge des questions médecine, « il y a là, au vu de l'évolution de la situation épidémiologique, un nouveau marché malheureusement en plein développement ». En effet, la demande d'évacuation sanitaire est largement supérieur à l'offre, suite au retrait des compagnies d'assurance. L'évacuation de l'infirmière française de Médecins sans Frontière avait ainsi pris près de 50 heures, un avion devant venir des États-Unis pour l'amener à Paris.

                                                                          Ces rapatriements doivent se faire en accord avec des mesures de sécurité très strictes

Jusqu'à récemment, une seule compagnie privée acceptait de s'occuper des rapatriements de personnes contaminées par Ébola. Phoenix Air, compagnie américaine, a déjà effectué plusieurs rapatriements vers les États-Unis et l'Europe (dont l'infirmière française). Celle-ci va avoir affaire à un concurrent désormais. La PME française Medic-Air International, spécialisée dans le rapatriement sanitaire, a en effet décidé de se « lancer » dans ce nouveau marché à haut risque. L'offre se réduit donc à ces deux entreprises, alors que les experts prévoient une explosion du nombre de contaminations en Afrique. Medic-Air International a ainsi évacué il y a quelques jours une infirmière norvégienne de Sierra Leone vers Oslo, en passant par Le Bourget, près de Paris.

Un marché en construction

Pour le Docteur Hervé Ruffin, créateur et directeur de Medic-Air International, « il faut dépasser les blocages actuels et aller chercher tous les malades où ils se trouvent dès lors que le risque est contrôlé ». Les malades arrivés en stade final de la maladie ne seront cependant pas pris en charge. Pour le Dr Ruffin, il s'agit de prendre en charge les malades le plus tôt possible pour les évacuer vers leur pays, où ils pourront être soignés efficacement.

Les difficultés entourant ces rapatriements sont indéniables. Le Dr Ruffin reconnaît que la majorité de ses pilotes sont réticents à l'idée de participer à des missions d'évacuation. Cependant, face au retrait des compagnies d'assurance, Medic-Air International et Phoenix Air sont aujourd'hui les deux seuls moyens d'être rapatrié si l'on est contaminé par Ébola en Afrique. La compagnie américaine facturant 200 000 $ le vol et par patient, qui sait qui aura le dessus entre la prudence et l'argent dans ce nouveau marché du rapatriement. 

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L'auteur
Laure Hanggi

Laure Hanggi

Rédactrice

Bio

Etudiante en histoire passionnée d'actualité en général et notamment des questions de santé moderne, en tant qu'enjeux de société. Voir plus

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