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Internet, nouveau refuge des hypocondriaques

Rédigé par , le 14 October 2017 à 10h00

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Internet est devenu le nouveau lieu de prédilection de l’hypocondrie. Avec des forums santé qui débordent de témoignages inquiétants, les internautes se découvrent tous types de pathologies. Mais Internet n'est-il pas également, dans certains cas, à l'origine de ces maladies imaginaires ? 

L’angoisse semble gagner internet. On ne compte plus les internautes qui sont persuadés de souffrir de maladies graves. Ces hypocondriaques d’un nouveau genre se précipitent en ligne au moindre symptôme suspect afin d’identifier le trouble qu’ils auraient contracté. Ce phénomène a été identifié dès 1999 par le Dr Donald Capra, un médecin-chercheur américain. Et la tendance n’est pas marginale, selon une enquête de l’INSERM : près de 30,2 % des Français vont chercher des informations de santé au moins une fois par semaine. En France, la source préférée de ces « cybercondriaques » est le site de santé Doctissimo, qui reçoit la bagatelle de 33 millions de visites par mois.

Si la tendance peut sembler inoffensive, voire amuser, ce véritable vertige de l’information peut transformer un outil de partage des savoirs – internet – en vecteur de désinformation. « La cybercondrie peut être plus nuisible que sa version traditionnelle, l’hypocondrie, à cause de la surabondance d’informations erronées ou imprécises en quelques clics », souligne une étude réalisée par le docteur Thomas Fergus, professeur de psychologie et de neurosciences. Et certains ont trouvé un moyen de rentabiliser ce bruit blanc, à l’image de l'industrie pharmaceutique qui n’hésite parfois pas à se servir de ces craintes virtuelles pour vendre une batterie de produits « miracles » aux plus fragiles d’entre nous.

Attention, tout ce qu’on trouve en ligne n’est pas pour autant exagération ou publicité cachée. Le docteur Schneider, président de l'Association des Médecins du canton de Genève (AMG) souligne qu’« il existe de très bonnes infos, utiles et cohérentes, qui peuvent éventuellement rassurer une personne ou au contraire lui faire prendre conscience qu'il y a un problème. Mais ces informations sont parfois noyées sous une masse d'articles médicaux dont le but est purement commercial. Ces articles sont peu objectifs et donc dangereux. » Le phénomène inquiète les professionnels de la santé, au point qu’ils sont nombreux à demander une meilleure régulation sur la question.

L’émergence de nouvelles peurs, comme celle des vaccins

Cette peur de la maladie a mené un certain nombre d’internautes à remettre en cause l’avis de médecins, persuadés que leur autodiagnostic prouvait leur maladie. D’autres, déçus par une industrie qui semble vouloir jouer au Dr Knock, et faire fructifier leurs craintes, ont également perdu confiance en celle-ci et les traitements qu’elle propose. Une des tendances les plus communes – et les plus dangereuses – qui s’est développée récemment est la phobie des vaccins. Le phénomène est particulièrement implanté en France, championne du monde en la matière.

Ainsi, le vaccin contre l’hépatite B est parfois cité comme « potentiellement dangereux » ou comme incitateur de sclérose en plaque. Ce lien ne peut toutefois être fait, selon l’Organisation mondiale de la santé, qui s’appuie sur les conclusions de neuf études, toutes concordantes à écarter tout lien de causalité entre les injections et la maladie dégénérative. Toutefois, le doute persiste chez certains, et les conséquences de cette défiance peuvent être graves, avec la réapparition de maladies éradiquées en Europe et la survenue de centaines de décès chaque année. On estime ainsi qu’au moins 3000 morts de personnes âgées pourraient être évitées tous les ans avec une simple vaccination contre… la grippe.

La cybercondrie 2.0 : la peur des ondes

Une autre manifestation tout aussi irrationnelle de cette cybercondrie est la peur des ondes, qui s’est propagée avec l’essor de la téléphonie mobile et des objets connectés. Le débat sur leur potentielle nocivité a fait apparaitre un nouveau type de peur, et l’un de ses corollaires les plus controversés est l'électrosensibilité. Cette « maladie » est au cœur d’un débat inextricable. Téléphones portables et WiFi sont-ils vraiment responsables des différents symptômes décrits par les électrosensibles : maux de tête, fatigue, troubles visuels et de l'audition, problèmes de peau (irritation, rougeurs, sensations de brûlure) ?

Les « malades » affirment souffrir d’une hypersensibilité aux ondes électromagnétiques, mais d’après l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), aucune des études menées jusqu'à présent que ce soit en France, Suède, Australie ou encore aux Etats-Unis ne permet de relier ces symptômes à l'exposition aux champs magnétiques. Plus sévère, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) refuse de considérer l'hypersensibilité électromagnétique comme un « un diagnostic médical ». Pour l’organisation, il s’agit tout juste d’une collection de « divers symptômes non spécifiques qui diffèrent d'un individu à l'autre ».

La peur des ondes a récemment atteint un niveau de tension sans précédent en France, avec la campagne – marginale mais très mobilisée – contre le déploiement de la nouvelle génération de compteurs électriques Linky. D’après ses détracteurs, le compteur communiquant d’Enedis serait un tueur silencieux – ni plus ni moins – à cause des ondes électromagnétiques qu’il dégage. Une opinion qui s’inscrit en contradiction totale avec toute la recherche, fournie, réalisée sur la question. Paradoxalement, les électrosensibles s’empressent bien souvent de dénoncer les effets nocifs des ondes en se connectant sur internet… via leur WiFi.

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